Vendredi le 28 avril 2023 à Sainte-Adèle
Voir le deuil autrement
Johanne de Montigny, psychologue
Les façons de traverser le deuil sont multiples. Au-delà du nombre croissant d’articles scientifiques, de textes informatifs, de livres inspirants, et des nombreux témoignages de ceux et celles qui restent, les variations demeurent; elles sont à la fois tributaires de la structure psychique de chaque individu (le style d’attachement), du contexte entourant la perte d’un être cher (soutien de l’entourage et ressources personnelles) et de l’évolution de la qualité des liens sur le long cours. Le moment de rupture entre la vie et la mort, entre le vivant et le mourant, ferme la porte à ce qui fut et incite au recouvrement de son propre souffle, à la quête de sens, à l’art de reprendre pied après le tremblement de son être (détonation psychique).
La personne en deuil, pour un temps indéterminé, tentera de vivre comme avant — une patiente me disait : je fais semblant — alors que la perte majeure vient de briser une part de son identité : qu’ai-je perdu de moi en te perdant? L’identité est donc à (re)penser, à (re)construire, à (re)définir au cœur même d’une vie bouleversée.
Les psychothérapeutes occupent une place centrale dans leur façon de soutenir les personnes en deuil entre le choc — je sais qu’il est mort mais je n’y crois pas—, la transition — j’avance, même seule, pour ne pas crouler sous ma perte — et la transformation que provoque la mort d’une personne significative — le repérage de ce qui me définissait avant sa mort, ce que je deviens sans lui, sans elle, ce que l’autre a façonné en moi avant et depuis sa mort. Les renoncements auxquels nous sommes tous conviés aux différents tournants de la vie ne se comparent pas avec la perte radicale qui, elle, marque l’impossible retour du défunt. L’enjeu psychique consiste alors à retrouver en soi le lien préexistant et à lui donner un nouveau scénario.
Les psychologues ont généralement reçu une ou plusieurs formations sur le deuil et possèdent de bonnes bases et de bons atouts (j’évite sciemment le mot outil) pour écouter, soutenir, accompagner, informer, parfois intervenir avec délicatesse et aplomb auprès de la personne en deuil. Sous un angle complémentaire, cette formation clinique d’approche humaniste — pensée et conçue pour L’Association des psychologues des Laurentides — vise à développer une connaissance approfondie de la souffrance particulière à la personne en deuil, à distinguer leur quête, à mieux comprendre ce qui les amène à nous consulter, et à développer des habiletés cliniques sur mesure.
Johanne de Montigny est psychologue en pratique privée à Montréal. Elle a œuvré pendant une trentaine d’années auprès de personnes en fin de vie dans le secteur hospitalier McGill pour se consacrer essentiellement et par la suite aux personnes en deuil ou interpellées par la perte éventuelle d’un être cher.