Vendredi Le 4 octobre 2024 à Sainte-Adèle

La supervision clinique, un
processus essentiel au
développement de la compétence et de l’efficacité professionnelle

Conrad Lecomte, Ph.D. psychologue

   Problématique de la supervision clinique

La pratique de l’intervention en santé mentale n’est pas sans soulever plusieurs questions. Nombreux sont les intervenants qui rapportent avoir de la difficulté à gérer la gamme des émotions qu’ils vivent au contact de ces patients. Émotions variant de l’anxiété à la dépression, de la colère jusqu’à l’hostilité. Comment arriver à trouver la bonne distance ? Comment ne pas se réfugier dans une approche distante de gestion de cas ou à l’inverse, tenter de trop en faire ? Face à des situations complexes où l’intervenant a l’impression d’avoir tout essayé, que faire ? Quand le doute, voire l’incertitude vient hanter l’intervenant, comment éviter le découragement ou encore le désabusement ? Comment arriver à maintenir et développer un engagement actif dans un développement de la compétence professionnelle et offrir des services de qualité ? Confronter aux exigences d’un travail difficile et complexe, la plupart des intervenants en santé mentale cherche de manière explicite ou incomplète à améliorer ou à consolider leur compétence professionnelle. De façon paradoxale alors que l’expérience vécue de l’intervenant supervisé s’exprime par des questions touchant le savoir, le savoir-faire et le savoir être, les modèles de formation et de supervision ont tendance à ne mettre l’emphase qu’à l’un ou l’autre de ces savoirs. À l’évidence, une approche intégrée semble
nécessaire pour tenir compte de l’ensemble de l’expérience des besoins de l’intervenant supervisé. 

C’est en proposant la supervision comme un espace de réflexion et d’intégration du savoir théorique, du savoir-faire ou technique et du savoir être expérientiel que l’intervenant peut espérer se sentir et être compétent et efficace. Plus l’intervenant arrivera à une intégration cohérente de son modèle théorique choisi, de sa théorie personnelle de la souffrance et de la guérison, de sa personnalité, de ses valeurs, de ses croyances, de ses expériences de vie, plus il donnera de la profondeur à son engagement et plus il pourra éclairer ses choix cliniques, ses modalités d’intervention et sa participation relationnelle. Le développement de la compétence et de l’efficacité professionnelle se définit et se déploie au cœur du processus de la conscience réflexive de soi en interaction.

Comment devient-on un superviseur? Quelques objectifs :

1. Maîtrisez les connaissances théoriques et empiriques portant sur les dimensions fondamentales des processus de supervision
               a) caractéristiques spécifiques de la supervision
               b) modèles de supervision
               c) Les objectifs fondamentaux de la supervision
               d) les processus fondamentaux de supervision
                         – la supervision comme espace de réflexion
                         – la supervision comme processus d’apprentissage
                         – les systèmes dynamiques d’influence mutuelle
               e) les processus et techniques d’intervention de supervision
               f) les enjeux relationnels en supervision
               g) les enjeux de l’évaluation en supervision 

2. Comment favoriser le développement de compétences professionnelles et une
pratique réflexive dans un processus de supervision?
                 a) Établir le cadre : objectifs, attentes, programme, évaluation
                b) Appliquer des habiletés d’intervention en supervision s’intégrant dans un processus de feedback
tenant compte des enjeux                              d’autorégulation et de régulation interactive du supervisé                                                                                                                                                c) Réguler les enjeux relationnels de la supervision                                                                                                                                                                  d) Utiliser des techniques spécifiques de supervision selon le développement du supervisé
                e) Utiliser avec flexibilité les rôles de monitoring-évaluateur, enseignant, thérapeute au service du processus d’apprentissage du                           supervisé

3. S’engager dans le développement de la conscience réflexive de soi en interaction :
               a) Reconnaître ses propres modalités d’autorégulation et de régulation interactive comme superviseur en interaction avec celles du                      supervisé
               b) Démontrer la capacité à faire des liens pertinents et rigoureux entre les apprentissages pratiques, théoriques et expérientiels
               c) S’engager dans le processus de reconnaître ses ressources et ses limites.

Conrad Lecomte est professeur du département de psychologie de l’université de Montréal, professeur associé de l’université du Québec à Montréal, à l’université de Sherbrooke et de l’université de Paris 8.

Depuis plus de 40 ans, il s’intéresse aux facteurs explicatifs de l’efficacité et du changement thérapeutique. En particulier, il cherche à préciser la contribution du psychothérapeute et de l’alliance psychothérapeutique au changement psychothérapeutique. Ses travaux portant sur la formation à l’intervention et sur la formation à la supervision clinique sont utilisés dans plusieurs programmes universitaires québécois et européens


Il a de nombreuses publications sous formes de livres, chapitres de livres et d’articles dans des revues scientifiques. Pour souligner sa contribution au développement de la psychologie tout au long de sa carrière l’Ordre des Psychologues du Québec lui a
décerné en 2012, le prix Mailloux ; et en 2014, l’université de Sherbrooke lui a décerné un doctorat honorifique.